Une entreprise chinoise clone le premier loup arctique | Polarjournal
Cette louve d’une centaine de jours, baptisée Maya, a été présentée au public il y a quelques jours par les médias d’État chinois et lors d’une conférence de presse à Pékin. Elle descend d’une louve arctique qui vivait dans un parc en Chine et qui est décédée en 2021. Image : Twitter China Science

Les animaux arctiques subissent des pressions de toutes parts. Outre les effets du changement climatique, la pollution, l’arrivée de nouvelles espèces, l’intensification de l’extraction de matières premières, les transports et, surtout, les chasseurs amateurs font que le nombre de la plupart des espèces est en baisse. Les expériences qui protègent les animaux comprennent, outre les mesures prises sur place, des programmes d’élevage dans les zoos et les jardins zoologiques. Les généticiens, en particulier, voient une autre forme de protection dans le développement du clonage. Une entreprise chinoise vient de réussir pour la première fois le clonage d’un mammifère polaire : un loup arctique.

En juin 2022, la petite louve arctique « Maya » est née à Pékin. Ce qui serait normalement une simple petite nouvelle d’un zoo ou d’un parc animalier a une signification beaucoup plus importante, car « Maya » est la première louve arctique et le tout premier mammifère polaire à être né en laboratoire par clonage. Après avoir passé les 100 premiers jours en bonne santé, la louve a été présentée au public lors d’une conférence de presse à Pékin.

Actuellement, « Maya » vit encore dans les laboratoires de Sinogene Biotechnology Co. à Pékin. Il est toutefois prévu que l’animal soit emmené au parc polaire de Harbin, où il sera ensuite élevé. Image : Twitter China Science

Le responsable de ce loup cloné est la société chinoise Sinogene Biotechnology Co. de Pékin. En général, l’entreprise clone les animaux domestiques comme les chats, les chiens et les chevaux. Mais il y a deux ans, l’entreprise a conclu un accord de coopération en matière de recherche avec le Parc polaire de Harbin afin de lancer un projet de protection du loup arctique, une espèce menacée, explique Mi Jidong, le directeur de l’entreprise, à la plateforme d’information Global Times. En tant qu’expert en clonage canin, Sinogene devait développer un loup arctique, c’est-à-dire une réplique génétique de la donneuse, à partir des cellules de peau (cellules donneuses) d’une louve arctique vivant dans le parc polaire, également appelée « Maya », et des ovules d’une chienne. Au bout de deux ans, l’équipe de recherche a finalement réussi à cloner 137 embryons, dont 85 ont pu être implantés dans sept beagles femelles. Sur les 85, il ne restait finalement qu’un seul animal, « Maya », qui est née le 10 juin. Actuellement, la petite louve vit encore avec sa mère adoptive dans les laboratoires de Sinogene. Mais lorsqu’elle sera assez grande, « Maya » sera ensuite transférée au parc polaire de Harbin, où elle continuera à être élevée, expliquent les représentants de Sinogene et du parc polaire.

Pour Sinogene, la naissance et l’élevage réussis de « Maya » ne sont qu’un début. On veut maintenant protéger d’autres espèces animales menacées d’extinction grâce au clonage, en collaboration avec des parcs animaliers publics chinois comme le Beijing Wildlife Part. Cependant, aucun plan concret n’a encore été discuté. Pour le parc animalier, cette procédure est un complément bienvenu lorsque d’autres formes de reproduction d’espèces menacées dans les parcs animaliers ne donnent aucun résultat. En outre, les deux partenaires veulent créer une sorte de banque de gènes pour les espèces animales menacées, à l’instar des banques de graines pour les plantes, dont l’une se trouve au Svalbard. Cela devrait notamment permettre de faire avancer le plan national quinquennal pour le développement de la Chine ordonné par le gouvernement chinois.

Le loup déguisé en mouton ? Le premier mammifère cloné avec succès a été « Dolly », une brebis Finnish-Dorset qui a vécu de 1996 à 2003. Aujourd’hui, l’animal empaillé se trouve au National Museum of Scotland. Image : Tony Barros via Wikicommons CC BY-SA 2.0

L’idée de mieux protéger les animaux polaires au moyen de clones n’est pas nouvelle. Depuis le premier clonage réussi d’un mammifère, la célèbre brebis « Dolly », cette méthode a souvent été citée. La méthode a déjà été discutée pour la protection des ours polaires et on veut même redonner vie à des animaux disparus, comme les mammouths et les rhinocéros laineux, en utilisant une méthode de clonage modifiée. Mais cette méthode a aussi de nombreux détracteurs, issus de différentes branches scientifiques. Les généticiens et les zoologistes, par exemple, ont averti qu’il n’y a toujours pas suffisamment de données montrant d’éventuels effets à long terme sur la santé ou le comportement. Les éthiciens de la science mettent également en garde contre le fait de considérer le clonage comme LA méthode de protection des espèces menacées. Ils soulignent que la plupart des espèces ont été mises en danger par l’exploitation inconsidérée de la nature par l’homme et que le clonage pourrait être utilisé comme un laissez-passer pour la poursuite de l’exploitation. D’autres vont encore plus loin et se demandent où il faut fixer la limite, notamment en ce qui concerne le clonage humain. Pour « Maya » en tout cas, le clonage est réussi. Mais son avenir est aussi incertain que celui de ses congénères sauvages dans l’immensité de la nature sauvage canadienne.

Dr. Michael Wenger, PolarJournal

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