La tuberculose continue de sévir au Nunavut | Polarjournal
La tuberculose frappe à nouveau le Nunavut. Cette fois, c’est Pond Inlet qui présente cinq cas actifs de TB et vingt-deux cas latents. Image : Michael Wenger.

Une nouvelle épidémie de tuberculose (TB) a atteint la communauté de Pond Inlet, dans le Nunavut au Canada. Cette maladie, pratiquement éradiquée sous nos latitudes, demeure cependant une réalité très présente au sein des communautés de ce vaste territoire canadien.

Le 24 mars dernier se déroulait la Journée internationale de lutte contre la tuberculose, l’occasion pour le gouvernement du Nunavut de réaffirmer son engagement commun avec le Nunavut Tunngavik Incorporated (NTI), représentant légal des Inuit du Nunavut, dans la lutte contre la tuberculose dans ce territoire canadien.

Une semaine auparavant, le ministère de la Santé déclarait qu’une épidémie de tuberculose sévissait au sein de Pond Inlet en raison d’une augmentation récente du nombre de cas de TB active, selon le communiqué publié sur le site officiel du gouvernement du Nunavut. Avec cinq cas actifs et vingt-deux cas de maladie latente (forme inactive de TB), Pond Inlet ne fait pas vraiement figure d’exception. Régulièrement, des épidémies se déclarent, touchant plus de la moitié des 24 communautés qui constituent le Nunavut.

Pond Inlet se situe dans la partie nord de l’lle de Baffin et compte environ 1’500 habitants. Image : Google Maps / Mirjana Binggeli.

« Pour réduire et, à terme, éliminer la tuberculose au Nunavut, il faut s’intéresser à la fois aux soins cliniques dispensés pour la tuberculose active et la tuberculose latente, et aux conditions socio-économiques qui permettent à la tuberculose de persister au sein de nos collectivités. », mentionne le communiqué publié sur le site du gouvernement du Nunavut. « Le GN continuera à fournir des programmes et des services de lutte contre la tuberculose, et NTI continuera à mettre en œuvre des initiatives centrées sur les Inuits et menées par les Inuits afin de soutenir la santé et le bien-être des individus, des familles et des collectivités, et en particulier des personnes qui sont actuellement touchées par la tuberculose ou qui l’ont été par le passé. Il reste encore beaucoup à faire mais en travaillant ensemble, nous atteindrons notre objectif qui est d’éliminer la présence de la tuberculose au Nunavut».

Une maladie ancrée dans la pauvreté

Et effectivement, il y a beaucoup à faire. La promiscuité et la malnutrition constituent les facteurs de contagion et de propagation de la tuberculose, de même que la pauvreté. Cette maladie touche au premier chef les populations vivant dans des conditions socio-économiques difficiles. Un accès restreint aux infrastructures de soins constitue encore un autre facteur d’autant plus aggravant qu’il ne permet pas de prévention, de diagnostic ou de prise en charge rapides des malades.

Les communautés inuit du Nunavut et leur 39’000 habitants sont ainsi particulièrement exposés à la maladie. La crise du logement qui sévit au sein de plusieurs collectivités, entraînant surpopulations dans les habitations, crée un terrain idéal pour la TB. Si l’on ajoute à cela la forte précarité qui affecte les communautés, la malnutrition, ainsi que l’isolement géographique, l’éloignement des structures de soins et l’insuffisance de personnel soignant, il n’est guère surprenant que le nombre de cas de tuberculose chez les Inuit du Canada soit près de 300 fois plus élevé que chez les non Autochtones.

Un lourd passé

Le Nunavut est l’endroit le plus touché du pays par la maladie, les politiques gouvernementales étant mises en échec, faute de ressources et de main d’œuvre, mais aussi à cause de la méfiance des Inuit. Cette dernière trouve racine dans la stratégie nationale en cours entre les années 1940-1960 qui consistait à envoyer les personnes testées positives à la maladie dans le sud, de force et sans qu’elles puissent dire au revoir à leurs proches. Isolés dans des établissements de soin où le personnel ne parlait leur langue, plusieurs d’entre eux n’ont pas survécu. Le 8 mars 2019, les larmes aux yeux, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, avait présenté auprès des Inuit des excuses pour cette gestion désastreuse de la tuberculose.

Le Hamilton’s sanatorium a été construit en 1906 et situé en Ontario. Plus de 1’200 Inuit y ont été admis pour tuberculose. Image : Black Mount Collection, Hamilton Public Library, Local History & Archives.

Introduite par les explorateurs, chasseurs et pêcheurs, la tuberculose a atteint les Inuit dès le 19ème siècle. Surnommée la peste blanche, la tuberculose est une maladie infectieuse provoquée par une bactérie, Mycobacterium tuberculosis. Transmise par voie aérienne, elle touche majoritairement les poumons et provoque des symptômes tels que la toux, une perte de poids, une grande fatigue, de la fièvre et des sueurs nocturnes. Traitée par antibiotiques, la vaccination systématique a permis d’endiguer la maladie dans les pays riches. Pourtant, elle continue de sévir dans les pays pauvres, faisant d’elle la première cause de mortalité d’origine infectieuse avant le SIDA, selon l’Organisation mondiale pour la santé (OMS).

Image principale : Wikicommons / Tuberculosis-x-ray-1

Mirjana Binggeli, PolarJournal

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