Des ateliers de construction de qajaq sont organisés par la commission scolaire du Nunavik, permettant ainsi aux élèves de renouer avec leurs racines.
Depuis quelques années, Kativik Ilisarniliriniq, la commission scolaire du Nunavik, organise des ateliers de construction de qajaq, offrant ainsi l’opportunité à ses participants de créer un élément emblématique de la culture inuit et de renouer avec leurs racines. Ces ateliers sont le fruit d’une initiative de Thomassie Mangiok, directeur de centre à l’école Nuvviti, située à Ivujivik, un village de 412 habitants du Nord-du-Québec.
Des ateliers ont déjà été organisés dans plusieurs villages à travers le Nunavik et prennent place dans le cadre du programme « Ilurqusitigut » (qui signifie « à travers notre culture ») visant à renforcer les valeurs, la langue et la culture inuit. Des ateliers de fabrication de qiviut (tissu produit à partir du duvet de bœuf musqué), de cuir de poisson ou de filets de pêche traditionnels ont déjà été donnés.
Fondée en 1975, la commission scolaire Kativik Ilisarniliriniq propose des programmes aux quatorzes communautés du Nunavik et exploite dix-sept écoles primaires et secondaires où les cours sont dispensés en inuktitut comme première langue. Comme n’importe quelle commission scolaire, elle offre des services éducatifs mais elle agit également pour protéger, préserver et développer la langue, la culture et le mode de vie inuit.
Nécessitant jusqu’à trois semaines de travail, la construction d’un qajaq permet aux élèves de développer toute sorte de compétences telles que le travail d’équipe et les techniques de travail du bois, le cours dispensé étant comparable à un cours d’ébénisterie pour débutant. Mais plus important encore est de permettre aux élèves de renouer avec leurs racines et leur culture, comme l’explique M. Mangiok: « Le fait de renouer avec notre culture recueille une importance grandissante. Le qajaq fait partie de ce mouvement, parce qu’il fait partie de nous ! Pour les élèves qui suivent le cours de culture, cela leur donne un sens accru de succès et de validation de leur identité. Ils comprennent qu’ils sont bons comme ils sont et qu’ils n’ont pas besoin d’être personne d’autre : ils sont Inuits ! »
L’apprentissage du qajaq est également crucial, notamment la technique de l’esquimautage où il s’agit de redresser un qajaq chaviré sans en sortir. Selon Alain Cloutier, maître constructeur, l’activité n’est pas sans risque : « Je n’encourage pas les élèves à mettre le qajaq à l’eau par eux-mêmes. Il existe un danger naturel, de sorte que l’activité doit être bien contrôlée… Aller sur l’eau représente un danger certain, tout particulièrement dans les régions froides. », encourageant les gens à pratiquer pendant deux ou trois ans avant de s’aventurer seuls à bord de ce type d’embarcation.
Généralement orthographié « kayak » sous nos latitudes, on pense que cette barque légère et maniable a été inventée par les Inuit du Groenland il y a plus de 4 000 ans. Principalement conçu pour assurer les déplacements durant la pêche et la chasse, notamment au phoque ou à la baleine, sa structure pouvait se composer de bois flotté ou d’os de baleine recouverts de peau (généralement de phoque) cousue avec des tendons animaux et rendue imperméable grâce à différents traitements. Le tirant d’eau extrêmement faible (à peine quelques centimètres) de cette embarcation ingénieuse permet au chasseur de se déplacer à l’aide d’une pagaie même dans de très hauts-fonds. Les qajait ne sont pratiquement plus utilisés au Nunavik. Chose qui pourrait changer grâce à des initiatives telles que ces ateliers.
Mirjana Binggeli, PolarJournal