Recommandations inuit à la COP28 | Polarjournal
Le 30 novembre dernier s’est ouverte à Dubaï la 28ème Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28). Chefs d’État, politiques, scientifiques, experts des questions climatiques, représentants du monde des affaires et lobbyistes se sont réunis pour discuter des actions à prendre contre un réchauffement climatique aux conséquences de plus en plus visibles. Image : COP28

L’Inuit Circumpolar Council (ICC) a adressé à la COP28 une prise de position comprenant cinq recommandations. Avec pour demande principale de prendre en compte les connaissances et compétences inuit, de mettre les populations autochtones au centre des prises de décision et d’agir en urgence pour limiter le réchauffement climatique.

Reconnaissance du statut distinct des Inuit. Inclusion des Inuit et de leurs connaissances dans la recherche sur leur territoire. Respect du droit à l’autodétermination. Accès à un financement climatique équitable. Reconnaissance du lien entre changement climatique et autres menaces environnementales. Telles sont, en substance, les cinq recommandations émises par l’ICC Canada dans une prise de position à l’attention de la COP28 et publiée le 24 novembre dernier par le conseil. Une prise de position dans laquelle l’ICC exhorte « les dirigeants mondiaux à s’engager dans des actions significatives qui reflètent notre respect commun pour l’environnement et garantissent la santé de notre planète pour les générations futures. »

Avec des recommandations basées sur les engagements énoncés dans la Déclaration d’Ilulissat du Conseil circumpolaire inuit de 2022 et dans la Déclaration de la Conférence des peuples de l’Arctique de 2023, le but de ce texte est de « mettre en évidence les préoccupations des Inuit et d’appeler à l’action les dirigeants internationaux, la communauté scientifique, l’industrie privée et d’autres. », selon le communiqué de presse publié sur le site de l’ICC le 27 novembre dernier et qui met en particulier l’accent sur la nécessité de prendre en compte les connaissances et compétences inuit notamment dans la recherche. Tout en mettant les populations inuit et autochtones circumpolaires au centre des discussions et des prises de décision. « L’exposé de position souligne à quel point les connaissances autochtones et les stratégies et pratiques de gestion d’adaptation et d’atténuation dirigées par les autochtones sont essentielles pour relever les défis et les changements qui se produisent dans l’Arctique. Notre droit inhérent à l’autodétermination doit être respecté alors que le monde entame sa transition vers un avenir plus durable. Notre appel à l’action à la communauté internationale est urgent. »

L’Inuit Circumpolar Council (ICC) est actuellement représenté à Dubaï par une délégation dirigée par sa présidente Sara Olsvig et sa vice-présidente Lisa Qiluqqi Koperqualuk, également présidente d’ICC Canada. La délégation est également composée de personnes détentrices de savoirs autochtones, des jeunes, ainsi que d’experts de l’Inuit Nunaat. Images (gauche à droite) : Wilson Center et ICC.

Une des recommandations de l’ICC porte sur l’inclusion des peuples autochtones de l’hémisphère nord dans le Fonds « pertes et dommages ». Ce dernier a été créé lors de la COP27 qui s’est tenue l’année dernière en Égypte. À l’heure actuelle, plus de 400 millions de dollars ont été promis par différentes nations pour le financer. 

Concrètement, le but de ce fonds est d’aider les pays les plus pauvres à faire face aux impacts du réchauffement climatique. Toutefois, il devrait principalement concerner les pays du sud : « […] tel qu’il est structuré actuellement, les Inuits et les autres peuples autochtones de l’Arctique n’auront pas accès au fonds, même si nous sommes parmi les plus touchés par le changement climatique », mentionnait jeudi dernier Sara Olsvig au journal Alaska Beacon. 

Selon les régions, l’Arctique se réchauffe de deux à quatre fois plus vite que le reste de la planète. Outre la perte de glace de mer, qui se réduit comme peau de chagrin, et le retrait dramatique des glaciers, le pergélisol subit également les conséquences du changement climatique. En fondant, le sol devient instable et s’écroule, ce qui amène à la déstabilisation et à l’effondrement des infrastructures et des habitations bâties sur ce type de sol. 

À cela s’ajoutent, entre autres, les événements météorologiques extrêmes, la sécheresse, les feux de forêt, les inondations, les glissements de terrain et le réchauffement des océans. Sans oublier l’impact sur les espèces animales et végétales, et donc sur la sécurité alimentaire des habitants de ces régions. 

Le réchauffement climatique a des conséquences importantes en Arctique, comme ici à Shishmaref, un village situé en Alaska et dont le pergélisol est en train de fondre. Pourtant, si les communautés autochtones sont particulièrement touchées, il n’est pas toujours facile pour elles de se faire entendre lors des grandes assemblées internationales comme la COP28. Image : Shishmaref Erosion and Relocation Commission.

Face à ces bouleversements, il y a urgence à agir. « Depuis des décennies, nous sommes témoins des impacts directs du changement climatique sur notre pays et nous avons toujours plaidé en faveur d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre afin d’éviter que ces changements ne deviennent une norme mondiale. », mentionne la prise de position de l’ICC. « Notre appel à l’action à la communauté internationale est urgent et nous appelons les parties à s’orienter vers une action climatique immédiate et substantielle qui reconnaît nos droits, intègre notre consentement libre, préalable et éclairé et reconnaît notre relation intrinsèquement durable avec la terre, l’eau, et la glace et nos ressources alimentaires traditionnelles. Ce ne sont pas seulement des ressources, mais elles sont également au cœur de notre culture et de notre vision du monde. »

Les cinq recommandations de l’ICC

Recommandation 1 : Reconnaître que les Inuits et les autres peuples autochtones ont un statut distinct et que tout travail sur le changement climatique doit être fondé sur une base solide en matière de droits de l’homme, y compris les droits de l’homme affirmés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ;

Recommandation 2 : Veiller à ce que toutes les recherches et prises de décision ayant une incidence sur les Inuits et l’Inuit Nunaat, notre patrie, incluent l’engagement équitable et éthique des Inuits et l’utilisation des connaissances autochtones ;

Recommandation 3 : Les mesures visant à lutter contre les changements climatiques ne doivent pas porter atteinte à nos droits distincts, y compris notre droit inhérent à l’autodétermination, en tant que peuples autochtones ;

Recommandation 4 : Créer des voies directes permettant aux peuples autochtones d’accéder à un financement climatique équitable, y compris le Fonds pour les pertes et dommages, et à d’autres financements liés à l’adaptation et à l’atténuation ;

Recommandation 5 : Les gouvernements doivent reconnaître le lien entre le changement climatique et d’autres menaces environnementales et soutenir le plaidoyer et les positions des peuples autochtones dans d’autres processus mondiaux.

Lien vers la prise de position de l’ICC : https://www.inuitcircumpolar.com/news/on-thin-ice-inuit-climate-leadership-for-the-world-unfccc-cop-28-position-paper/

Mirjana Binggeli, PolarJournal

Image d’illustration : Logo de l’Inuit Circumpolar Council

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