Chalut de fond responsable de la plupart des décès d’orques liés à la pêche cette année, selon la NOAA | Polarjournal
Une orque nage dans les eaux de l’Alaska le 25 juillet 2013. Onze orques ont été retrouvées piégées dans des engins de pêche cet été dans la région de la mer de Béring et des îles Aléoutiennes, en Alaska, et dix d’entre elles sont mortes. Photo : Kaitlin Thoreson/National Park Service

Une enquête a révélé que certaines orques étaient mortes avant d’être prises au piège, mais les détracteurs de la pêche au chalut de fond se posent d’autres questions sur l’ampleur du bilan de cette année. Nous reproduisons ici l’article qui a été publié à l’origine sur le site web de l’Alaska Beacon.

Une enquête fédérale sur le nombre inhabituellement élevé d’orques de la mer de Béring et des Aléoutiennes retrouvées mortes cet été a permis de déterminer que la plupart des décès, mais pas tous, ont été causés par l’enchevêtrement des animaux dans des engins de pêche.

Le National Oceanic and Atmospheric Administration’s Alaska Fisheries Science Center a publié vendredi quelques détails sur les décès survenus dans la mer de Béring et les Aléoutiennes, qui ont suscité de vives critiques à l’égard des pratiques de chalutage des espèces marines.

Sur les neuf orques qui ont été retrouvées piégées dans des engins de pêche au chalut de fond, six ont été tuées par ces enchevêtrements, mais deux autres étaient déjà mortes avant d’être capturées dans les filets, d’après l’enquête. Un autre animal a été gravement blessé en s’enchevêtrant dans l’engin mais s’en est sorti vivant, a indiqué l’agence.

En plus des neuf baleines trouvées dans des engins de pêche au chalut de fond, il y a eu deux autres cas d’orques mortes trouvées empêtrées dans d’autres types d’engins de pêche.

L’engin de pêche au chalut de fond dans lequel les neuf orques se sont retrouvées emmêler provenait de navires appartenant à ce que l’on appelle l’Amendment 80 fleet, soit une vingtaine de grands navires qui capturent et transforment le poisson. Ces entreprises de capture et de transformation utilisent des chaluts qui balayent le fond marin pour pêcher le maquereau Atka, différents type de sole (Limanda aspera et Lepidopsetta bilineata), ainsi que d’autres espèces de poissons plats. Ils ne pêchent pas le colin, l’espèce qui représente le plus gros volume des produits de la mer pêchés en Alaska.

Dans les deux autres cas, une orque morte a été trouvée dans un chalut utilisé par un navire pêchant le colin, a indiqué l’agence. Il a été établi que cette baleine était morte avant de se retrouver enchevêtrée.

Les pêcheurs de colin de l’Alaska n’utilisent pas d’engins de chalutage de fond ; au lieu de cela, leurs filets ramassent les poissons dans des eaux qui se situent plutôt dans la moyenne des profondeurs de l’océan.

Le 11e cas est celui d’une baleine retrouvée morte dans un engin de pêche à la palangre utilisé par un navire de la NOAA Fisheries pour effectuer une étude annuelle sur la morue charbonnière et les poissons de fond. Depuis 30 ans que la NOAA Fisheries mène cette étude, il s’agit de la première mort d’orque, a indiqué l’agence.

L’analyse génétique d’échantillons prélevés sur huit des baleines a révélé que toutes appartenaient au groupe résident du Pacifique Nord-Est, le plus abondant des groupes d’orques de l’Alaska. Tous les individus étaient des femelles, a indiqué l’agence.

Une morue charbonnière est observée sur le fond marin au large de la Californie en 2005. La morue charbonnière a une valeur relativement élevée sur les marchés commerciaux des produits de la mer, et les chalutiers visés par l’amendement 80, qui pêchent principalement des poissons plats de fond moins chers, sont autorisés à pêcher également le charbonnier. Photo : Rick Starr/National Oceanic and Atmospheric Administration

L’enquête a révélé que le nombre total d’orques mortes était beaucoup plus élevé que les années précédentes, mais pas suffisamment pour avoir des effets négatifs sur la population.

« Étant donné le niveau élevé de captures accidentelles d’orques en 2023, nous savions qu’il était important d’agir aussi rapidement que possible pour mieux comprendre si ces captures accidentelles posent un problème de conservation pour l’un des groupes d’orques potentiellement concernés », a déclaré Robert Foy, directeur de l’Alaska Fisheries Science Center. C’est pourquoi le centre a accéléré l’analyse génétique afin de mieux comprendre les impacts potentiels sur les différentes populations d’orques de l’Alaska.

Pour Jon Warrenchuk, scientifique principal au sein de l’organisation environnementale Oceana, ces résultats soulèvent d’autres questions. Selon lui, les décès d’orques sont de plus en plus fréquents dans lors des pêches au chalut.

« Nous avons largement dépassé le stade de l’examen approfondi des effets du chalutage de fond en Alaska », a déclaré M. Warrenchuk.

Il a également noté que les poissons plats pêchés par les navires impliqués dans les décès sont généralement moins chers et de moindre valeur. « Le fait que cela se soit produit pendant la pêche de ce poisson de faible valeur remet en question le fait que la valeur de cette pêche vaille le coût de la mort de toutes ces baleines », a-t-il déclaré.

Selon M. Warrenchuk, il est possible que les chalutiers impliqués dans l’enchevêtrement des cétacés ciblaient la morue charbonnière, une espèce plus précieuse que les poissons plats qui constituent l’essentiel des prises des navires. Les navires visés par l’amendement 80 n’avaient pas le droit de cibler la morue charbonnière les années précédentes, mais cela a changé récemment et ils ont désormais des droits sur des quotas pour certains de ces poissons de plus grande valeur, a-t-il fait remarquer.

Oceana a demandé plus d’informations sur les lieux et les heures où les incidents se sont produits.

Les détracteurs des pratiques de chalutage dans la mer de Béring ont déclaré que la mort des orques pourrait être imputable aux rejets de poissons capturés accidentellement dans les filets. Les baleines ont identifié les chalutiers comme une source de nourriture, affirment les critiques.

En particulier, ils ont mis en évidence une pratique connue sous le nom de « triage du flétan sur le pont ».Les chalutiers visés par l’amendement 80 sont autorisés à remettre à la mer le flétan capturé accidentellement sans que cela ne soit pris en compte dans leurs limites de prises accessoires, à condition que le poisson soit renvoyé à l’océan dans les 35 minutes et qu’il soit en bon état. Toutefois, un rapport récent soumis au North Pacific Fishery Management Council fait état d’une réduction significative, depuis 2020, des cas observés d’orques se nourrissant des rejets de chalutiers relevant de l’amendement 80.

Les prises accessoires de flétan par la flotte relevant de l’amendement 80 suscitent d’autres inquiétudes. La semaine dernière, la NOAA Fisheries a adopté une nouvelle règle qui pourrait réduire le plafond des prises accessoires de flétan de la flotte. La règle remplace la limite fixe actuelle de 1 745 tonnes par une limite qui peut être réduite de 35 % si les populations de flétan sont faibles.

Yereth Rosen, Alaska Beacon

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