L’hiver 2023 a connu le plus faible record d’étendue de glace de mer autour de l’Antarctique. Une baisse de la superficie de la glace de mer par rapport aux valeurs moyennes causée par les cyclones polaires et les dépressions atmosphériques.
Records bas à répétition. Le retrait de la banquise se poursuit depuis 2016 d’été en été. Pendant cette période, les anomalies sont restées légères l’hiver jusqu’à ce que des vents chauds et humides forts venus du nord soufflent vers le sud sur la mer de glace. Dans la revue Geophysical Research Letters, le 27 mars dernier, une équipe de recherche indo-britannique a décrit ce phénomène unique observé en 2023, attestant que les effets du changement climatique ont touché pour la première fois la banquise en hiver.
La surface de la banquise a donc atteint un minimum record, ne dépassant pas les 17 millions de kilomètres carrés. Les valeurs médianes des enregistrements pris depuis plus de 40 ans tournent autour de 19 millions de kilomètres carrés. Ce record suit celui de l’été 2023, lequel correspond au niveau le plus bas jamais enregistré de la glace de mer : 1,79 million de kilomètres carrés. Et il précède le deuxième record estival, celui de cette année. « Quand nous avons des conditions basses de glace en été, cela impacte l’extension des glaces en hiver et vice versa », nous explique Babula Jena, l’auteur principal de cette étude, physicien des océans en Inde au Centre national d’études des pôles et de l’océan (NCPOR).
Deux raisons ont ralenti la reconstitution de la glace de mer lors de l’hiver 2023 : premièrement, « la chaleur et le réchauffement de l’océan », précise-t-il, et deuxièmement, « les vents qui vont vers le sud », ajoute-t-il. Les vents poussent la glace d’une part et activent les remontées d’eaux chaudes vers la surface de l’autre. Deux actions combinées qui font reculer la glace par phase.
Le vent du nord a été apporté par des cyclones polaires atypiques, « explosifs », c’est-à-dire qu’ils restent stationnaires au-dessus de certaines mers de l’Antarctique au lieu de passer. « C’était très exceptionnel », remarque le chercheur. Puis la zone dépressionnaire – qui attire le vent – de la mer d’Amundsen s’est particulièrement creusée, et le blocage atmosphérique de la calotte glaciaire a été particulièrement présent. La glace de mer a donc plus subi l’effet du vent en mer de Ross, où s’est joué 37 % du record bas d’extension hivernale de la glace de mer de 2023.
« Nous avons besoin de plus d’observations et de travailler avec des modèles plus précis pour savoir concrètement ce qu’il va se passer, mais il est probable que la glace de mer reste à un niveau bas », explique le physicien. Les phases de recul de la glace de mer en hiver impactent notamment les manchots empereurs qui nichent en cette saison, et les larves de krill qui hivernent sous la banquise. Moins de glace, c’est aussi plus de réchauffement de l’océan sous l’effet de l’énergie lumineuse, modifiant les circulations océanique et atmosphérique au niveau mondial.
Camille Lin, PolarJournal
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