Deux amis mettent l’expérience personnelle d’un hivernage du météorologue Peter Fisher en musique dans l’album Life on Sub-Antarctic Campbell Island – The Weather Station Years.
« C’est comme si cette musique dessinait Campbell Island, ses explosions florales, ses animaux… une beauté que très peu de gens ont eu le privilège d’observer sur une longue période », explique le météorologue néo-zélandais Peter Fisher au cours d’un entretien avec PolarJournal. La musique ? C’est celle de l’album Life on Sub-Antarctic Campbell Island – The Weather Station Years, sorti fin avril. Vingt-deux titres du musicien néo-zélandais Tony Parker qui sonnent avec un style rock aux consonances de road-movie. Ces deux amis se connaissaient depuis longtemps quand, il y a trois ans, ils ont décidé de coproduire le projet musical.
Tony Parker n’est pourtant jamais allé à Campbell, contrairement à Peter Fisher qui a hiverné entre 1994 et 1995 lorsqu’il était en mission pour MetService, l’équivalent de Météo France. « Je me suis glissé dans la peau de Peter, qui en plus de son expérience est une mine d’information », raconte le musicien. Ce monde ne lui est pas complètement étranger non plus. Quand Peter Fisher hivernait, Tony Parker lui envoyait du courrier parachuté sur l’île par les forces aériennes, et ils avaient quelques conversations par radiotéléphone.
Plusieurs histoires de l’île lui ont permis de se construire un imaginaire. Par exemple, celle du retour d’un tout petit canard endémique, après la libération de l’île des rongeurs, il y a 20 ans. Ou encore, la légende de Lady of the Heather, une femme qui y aurait vécu au XIXe siècle. Puis il s’est immergé d’impressions qui retranscrivent « la magie de cet endroit », comme avoir « un gorfou huppé dans la cuisine », ou « retrouver un phoque dans son lit qui ne voudrait pas bouger ».
Des sons enregistrés sur place émaillent la musique, issus des pérégrinations de Peter Fisher à l’époque. « Beaucoup n’étaient pas utiles parce que c’était très venteux », précise le musicien, « mais cela m’a aussi permis de rentrer dans le sujet. » On entend le passage d’un avion, le craquement d’une radio, « c’est la seule musique où on peut entendre un rapport météo codé dans le fond », raconte Peter Fisher, « des fois à trois heures, j’allumais ma radio pour envoyer le compte-rendu en Nouvelle-Zélande. Tout le monde dormait, les animaux criaient à l’extérieur, ce rituel était un peu comme un phare dans l’obscurité. »
Les deux amis ont pu échanger librement pour concevoir l’album. Tony Parker lui a envoyé ses enregistrements pour voir si la musique lui suscitait son passage sur l’île. Trois ans de travail. « On n’était pas pressé », précise le musicien, principalement guitariste, mais qui s’est enregistré au clavier, à la batterie et au chant, sur des airs parfois planants.
Glide dépeint le vol des albatros dans les vents typiques de l’océan Austral. « Pour Isolation, j’ai essayé de savoir ce que cela voulait dire l’isolement », explique-t-il. « J’ai d’abord pensé à une chanson triste et solitaire, mais les gens qui sont restés longtemps sur Campbell Island expliquent que c’était inspirant et fascinant. » Peter Fisher est très heureux d’avoir réveillé ses souvenirs de l’hivernage et redonné vie à ses enregistrements, 30 ans plus tard : « Tony a réussi à ouvrir une porte vers cette partie de la Terre à ceux qui n’y ont pas accès. »
Camille Lin, Polar Journal AG
Lien vers la musique :
En savoir plus sur le sujet :