Le petit rorqual de l’Antarctique, une espèce socialement flexible | Polarjournal
Un groupe de petits rorquals de l’Antarctique (Balaenoptera bonaerensis) équipés du dispositif de détection et d’enregistrement. Cette espèce de cétacés peut atteindre 10 mètres de longueur et peser jusqu’à neuf tonnes. On rencontre ces rorquals dans les eaux de l’hémisphère Sud, et notamment en Antarctique où ils chassent le krill. Photo : David E. Cade

Une étude récente montre que les petits rorquals de l’Antarctique sont capables de socialiser dans certaines situations. Une découverte obtenue grâce à des dispositifs de balises de détection et d’enregistrements vidéo et audio installées sur une vingtaine de sujets.

Au sein de l’écosystème antarctique, ils sont les grands prédateurs du krill et aussi une espèce qu’on connaît plutôt mal. Grâce à une étude menée par une équipe de chercheurs américano-australienne, on en sait enfin plus sur les comportements sociaux et alimentaires des petits rorquals de l’Antarctique.  

Des scientifiques de la Griffith University et de l’Université de Santa Cruz en Californie ont en effet mené l’une des premières études quantitatives sur la structure sociale chez ces cétacés emblématiques de l’Antarctique, ainsi que sur leur manière de s’alimenter en groupe. « Les principaux prédateurs du krill, tels que le petit rorqual de l’Antarctique […], jouent un rôle essentiel au sein du fragile écosystème de glace de mer de l’Antarctique. », peut-on lire dans l’étude publiée le 25 mai dernier dans la revue Behavioral Ecology and Sociobiology. « C’est un spécialiste abondant du krill, mais son rôle écologique dans l’Antarctique reste mal compris en raison de son comportement cryptique et son habitat éloigné. Il est donc crucial de développer une compréhension de base de ses fondamentaux sociaux et l’écologie alimentaire. »

Les chercheurs ont mené leur étude dans les baies Andvord et Paradise, dans la partie ouest de la péninsule Antarctique. Les points bleus indiquent les endroits où les balises de détection ont été déployées. Carte : Allen et al.

L’une des premières découvertes faites par les chercheurs est que les petits rorquals de l’Antarctique présentent une structure sociale à dynamique de fission-fusion. Ce type de structure est constitutive des espèces animales qui se rassemblent dans certaines circonstances (se nourrir ou dormir, par exemple) avant de se séparer, souvent en sous-groupes, amenant à une composition sociale qui évolue constamment. On la rencontre souvent chez les mammifères terrestres et marins et, grâce à cette étude, on peut désormais établir que les petits rorquals de l’Antarctique présentent ce genre de dynamique sociale au même titre que d’autres espèces de baleines à fanons. 

En effet, dans 60% des cas, les scientifiques ont observé que cette espèce de rorqual formait des associations à court terme, autant dans la recherche de nourriture que dans d’autres activités. 

Les chercheurs ont été également observé que les individus plus grands étaient plus enclins à socialiser que les sujets de plus petite taille (et souvent plus jeunes), réduisant ainsi leurs efforts dans la recherche de nourriture et en s’associant, dans au moins douze cas, en groupes de deux ou trois individus. Mais ce n’est pas tout. Les observations ont également démontré que les comportements de plongée étaient synchronisés, suggérant que ces animaux utilisent des stratégies de recherche de nourriture en groupe. Un comportement que l’on avait auparavant sous-estimé chez cette espèce. 

Pour arriver à ces conclusions, l’équipe de recherche a équipé 28 petits rorquals de l’Antarctique de balises de détection de mouvement et qui effectuaient également des enregistrements vidéo et audio. Ce procédé a permis de mesurer les plongées, la recherche de nourriture et les comportements sociaux des cétacés. L’étude s’est déroulée en 2018 et 2019 dans les baies Andvord et Paradise, dans la partie ouest de la péninsule Antarctique.  

« Ces résultats fournissent des informations de base essentielles sur la socialité et les comportements de recherche de nourriture en groupe des petits rorquals de l’Antarctique », mentionne le Dr Jenny A. Allen, chercheuse et principale auteure de l’étude dans un communiqué de presse publié le 27 mai dernier par la Griffith University en Australie. « Comprendre ces tendances est crucial, d’autant plus que le changement climatique continue d’avoir un impact sur l’écosystème de l’Antarctique. » Dans un environnement qui se réchauffe à grande vitesse, comprendre la relation entre les espèces antarctiques est en effet un sujet crucial.

Lien vers l’étude : Allen, J.A., Cade, D.E., Casey, C.B. et al. Evidence of sociality and group foraging in Antarctic minke whales (Balaenoptera bonaerensis). Behav Ecol Sociobiol 78, 61 (2024). https://doi.org/10.1007/s00265-024-03481-4

Mirjana Binggeli, Polar Journal AG

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