Une cohabitation facilitée avec les animaux de Crozet | Polarjournal
La Baie du marin a plusieurs fonctions : études scientifiques, opérations techniques et la plage et la rivière du Camps constituent un biotope idéal pour la colonie de manchots. Image : Nelly Gravier / TAAF

Les travaux de modification des installations côtières de la base Alfred-Faure de Crozet se sont terminés le mois dernier, avant la saison de reproduction pour que les manchots retrouvent de l’espace et de la liberté pour circuler, sur ce territoire reconnu par l’Unesco pour la qualité de son paysage.

Dans l’océan Indien, sur l’archipel de Crozet, proche du front polaire, la baie du Marin, sur l’île de la Possession, abrite une manchotière mais aussi le port de la station scientifique Alfred-Faure. Ainsi, d’une part se trouve une colonie de manchots royaux, relativement stable, et de l’autre, les scientifiques de l’Institut Polaire Français, le personnel des Terres Australes et Antarctiques Françaises et occasionnellement des marins pêcheurs ou des marins de la Marine nationale, en visite. La baie du Marin porte donc bien son nom. Les installations portuaires sont sommaires avec une cale et des citernes de fioul, tout comme les infrastructures scientifiques : quelques abris pour étudier les manchots de loin ou de près. « Ils sont très étudiés, avec quatre différents programmes scientifiques », rappelle Clément Quétel, chef du service Conservation et restauration des milieux naturels de la Réserve naturelle nationale des Terres australes françaises.

Depuis quelques années, les opérations logistiques dans la baie du Marin ne sont réalisées qu’en hiver, lorsque la colonie est moins active. En été, le matériel est chargé et déchargé par hélicoptère. Image : Clément Quétel

Cette cohabitation est permanente depuis 1964, depuis que la station scientifique a été construite à moins d’un kilomètre à pied de cette plage, accessible par une piste. Le littoral de l’île étant très escarpé, les possibilités de débarquement sont très limitées, la baie du Marin restant la meilleure solution. « L’installation d’une infrastructure génère forcément du passage, rappelle Clément Quétel, c’est un point étape avec la logistique associé. » Afin de réduire l’empreinte environnementale laissée par les usagers de l’île et la gêne occasionnée pour la colonie de manchots, la Réserve naturelle nationale des Terres australes françaises a décidé de modifier le plan des installations portuaires. « Il s’agissait de retrouver un équilibre entre le bon fonctionnement de l’écosystème et le passage des scientifiques », explique Franck Lustenberger, directeur de la réserve naturelle nationale. Les travaux se sont achevés le mois dernier, grâce – entre autres -, aux 29 ouvriers qui ont mis les plans à exécution.

Le site portuaire – auparavant cloisonné -, a été ouvert pour que les manchots puissent circuler entre la plage et le fond de la colonie. « Cette zone centrale est utilisée par ceux qui ne se reproduisent pas, ou sont juste de passage, mais on espère qu’il y aura un jour de la reproduction », ajoute Clément Quetel. Un second espace libéré après l’abattage d’une barrière, maintenant apprécié par les manchots de la colonie, est cependant plus prometteur pour l’installation des couples. La piste a été, quant à elle, cloisonnée par des barrières en bois. « Les passages sont moins visibles depuis la colonie », ajoute Clément Quetel. Les TAAF en ont profité pour connecter les sanitaires des cabanes du port à une fosse septique.

Ces travaux répondent à une autre problématique : la baie du Marin fait partie d’un site classé au Patrimoine mondial de l’Unesco. « En remplaçant le béton par du bois, un matériau naturel, le paysage retrouve aussi de sa qualité. ajoute Franck Lustenberger. L’enjeu dans ces travaux, c’était de trouver le bon point de rencontre pour concilier toutes ces contraintes. On y arrive en prenant un peu le temps et en y réfléchissant. »

Le projet vise à redonner à la baie son caractère naturel et sauvage. Image : Nelly Gravier / TAAF

En juillet dernier, le European Polar Board publiait un rapport sur l’impact environnemental de la recherche et de la logistique des régions polaires. La gêne et le dérangement causés à la faune sont identifiés parmi les nuisances. Les auteurs préconisent le regroupement des missions pour réduire les trajets en véhicules, comme ce qu’il se fait en Antarctique. Il pointe du doigt aussi l’impact environnemental des logements, pour le bruit et la lumière. Des questions qui sont importantes pour la Réserve des Terres australes françaises et l’Institut polaire français.

Camille Lin, PolarJournal

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