2100 : il ne restera qu’un tiers des glaciers de la planète | Polarjournal
Les glaciers, comme le glacier de Monaco au Svalbard, auront perdu plus de masse d’ici la fin du siècle que ne le prévoyaient de précédentes études. Photo : Julia Hager

Plus un objectif est clairement défini, plus il est possible de travailler efficacement pour l’atteindre. Et bien sûr, pour pouvoir l’atteindre, il doit être concret, compréhensible et réaliste. C’est la seule façon pour les entreprises de réussir grâce à leurs employés. Mais qu’en est-il de l’objectif très concret, compréhensible et réaliste de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C ? C’est à cela que l’humanité semble largement échouer. A l’heure actuelle, nous nous dirigeons plutôt vers un réchauffement de 2,7°C, qui entraînerait la perte des deux tiers des glaciers mondiaux d’ici 2100, selon une nouvelle étude publiée dans la revue Science.

Si cela devait se produire, non seulement le niveau de la mer monterait de onze centimètres, mais l’approvisionnement en eau potable ne serait plus assuré pour une grande partie de la population mondiale. De plus, le risque de glissements de terrain et d’inondations augmenterait en raison de la fonte des glaciers.

Il n’est toutefois pas nécessaire d’en arriver là. Selon la même étude, nous avons encore la possibilité de préserver environ la moitié des glaciers, si nous parvenons à limiter le réchauffement à 1,5 °C. Cela serait techniquement possible, mais peu probable selon de nombreux scientifiques. Dans tous les cas, les petits glaciers, en particulier, disparaîtront .

« Nous allons certainement perdre de nombreux glaciers », déclare David Rounce, glaciologue et professeur d’ingénierie à l’université Carnegie Mellon en Pennsylvanie et auteur principal de l’étude. « Mais nous avons la possibilité de faire une différence en limitant cette perte ».

D’ici 2100, on ne trouvera pratiquement plus de glaciers, hormis dans les régions polaires, comme ici dans la péninsule antarctique, et dans l’Himalaya. Photo : Julia Hager

L’étude prend en compte les 215.000 glaciers terrestres de la planète, à l’exception des glaciers des calottes du Groenland et de l’Antarctique. Bien plus que dans les études précédentes, l’équipe de recherche internationale a calculé, à l’aide de simulations informatiques, combien de glaciers disparaîtraient dans les différents scénarios de réchauffement, combien de milliards de tonnes de glace fondraient et quelle en serait l’effet sur l’élévation du niveau de la mer.

Dans l’hypothèse d’un réchauffement de +2°C, les régions périphériques du Groenland, de l’Arctique canadien, ainsi que de l’Antarctique et du Sub-Antarctique, représentent à eux seuls 60 à 65 % de l’élévation du niveau de la mer. La perte de masse de glace dans ces régions à grands glaciers se poursuivra au-delà de la fin du siècle. Pour les grands glaciers en particulier, il existe une relation linéaire entre l’augmentation de la température et la perte de masse. Cela signifie que chaque dixième de degré Celsius a une influence considérable sur cette perte. En revanche, dans d’autres régions où les glaciers sont plus petits, comme dans l’Arctique russe, le Svalbard et l’Islande, ce lien est plus faible en raison de la plus grande variabilité des températures et des précipitations.

À la fin du siècle, à part les glaciers du Karakorum et du Kunlun, la masse de glace restante se trouvera principalement dans le sud-est de l’Alaska, dans le nord de l’Arctique canadien, dans les régions périphériques du Groenland, au Svalbard, dans l’Arctique russe, ainsi que dans l’Antarctique et le subantarctique, une grande partie de ces glaciers se jetant dans l’océan.

Selon cette étude, la perte de glace sur les fronts des glaciers intertidaux devrait diminuer d’ici 2100, mais uniquement parce que les glaciers dans leur ensemble s’amincissent et transportent moins de glace vers l’océan. Photo : Julia Hager

Dans ses derniers calculs, l’équipe d’auteurs a explicitement inclu la perte de glace sur les fronts de ces glaciers de marée, contrairement aux études précédentes, et affirme que sa prise en compte sera déterminante au cours du prochain siècle. Leurs résultats montrent que d’ici 2100, la perte de masse de glace sur les fronts de glaciers diminuera dans un scénario +2°C. Les glaciers de l’Europe de l’Est et de l’Asie du Sud-Est sont les plus touchés. Ils expliquent cela par leur raréfaction, leur repli sur la terre ferme et la diminution du flux de glace dans l’océan qui en résulte.
Dans l’Antarctique et le Sub-Antarctique, l’Arctique russe et le Svalbard, la contribution relative due à la fonte sur le front des glaciers sera la plus élevée.

Dans un court article consacré à l’étude, Gudfinna Adalgeirsdóttir et Timothy D. James concluent que « tout effort visant à limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale aura un impact direct sur le nombre de glaciers qui seront perdus », même s’il est déjà trop tard pour empêcher la perte d’un bon nombre d’entre eux.

Julia Hager, PolarJournal

Lien vers l’étude : David R. Raunze et al. Global glacier change in the 21st century : Every increase in temperature matters. Science, 379 (6627). DOI : https://doi.org/10.1126/science.abo1324

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